Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 2, 1912.djvu/36

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Les traités de Vienne déchirés, c’était comme une revanche du patriotisme français. Imagination dangereuse et que l’événement déçut cruellement : les insultes de Crispi, l’entrée des troupes allemandes à Paris, tels furent l’appareil lugubre et le triste décor d’une transformation européenne tant de fois appelée des cœurs français ! « L’immense échec », que Proudhon ne vit point, mais qu’il prophétisait, lui semblait trop imminent et trop certain pour qu’il pût s’associer aux chimériques vœux des libéraux et des démocrates.

« Plaçons-nous maintenant au point de vue français, intimement lié au point de vue européen », prononçait-il ailleurs.

Proudhon défendit les traités de Vienne, dans un opuscule éloquent, qui contient un plaidoyer des plus émouvants en faveur d’une politique européenne. Deux points de vue dominent son étude et lui conservent une magnifique actualité : les intérêts de la civilisation et les intérêts de la France dans le monde.

La nécessité d’une existence européenne, d’un ordre européen, Proudhon la découvrait comme un axiome au centre de ses recherches d’homme civilisé : aussi bien les récriminations des partisans des nationalités se butent-elles contre les arguments péremptoires de Proudhon :

« Aux principes proclamés à Vienne on en oppose d’autres, plus en rapport avec les imaginations, plus attrayants dans leur matérialisme : c’est, d’une part, le principe des nationalités, simple en apparence et d’application facile, au fond indéterminable, sujet à exception et contradiction, source de jalousie et d’inégalité ; en second lieu, le principe, plus louche encore, plus arbitraire dans son fatalisme, des frontières naturelles »[1].

Sans doute, accordait Proudhon, la configuration du

  1. Si les traités de 1815 ont cessé d’exister, page 280.