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Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 5-6, 1912.djvu/14

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fois encore, conformément aux desseins secrets de la Finance, on ne passera pas à l’acte.

Cela est si vrai qu’on ne comprendrait pas la tolérance singulière du Gouvernement vis-à-vis d’un Congrès comme celui qu’a organisé la C. G. T. contre la guerre et où elle semble avoir pris des résolutions d’un caractère extrêmement grave, si la situation était vraiment critique ; cette tolérance singulière et l’espèce de demi-silence fait par la presse bourgeoise autour de ce Congrès — on se serait attendu à de furieux aboiements — s’expliquent très bien, au contraire, s’il ne s’agit que d’utiliser, en vue de la paix réelle et du renforcement du système bourgeois de la paix armée, la protestation même de la classe ouvrière contre la guerre. Ce Congrès se trouverait ainsi, selon toute apparence, avoir servi les intérêts de la Ploutocratie. « Satellites de la Ploutocratie », écrit Corradini en parlant des socialistes ; il est triste d’avoir à étendre cette infamante qualification aux syndicalistes eux-mêmes.

C’est que, malheureusement, les syndicalistes semblent, dans leur protestation a priori contre la guerre, n’être animés que de sentiments d’un caractère beaucoup plus bourgeois que vraiment ouvrier. Ils semblent oublier, eux, révolutionnaires soi-disant à tous crins, que la guerre peut, dans certains cas, être un événement révolutionnaire de premier ordre. Ils se placent pour la condamner à un point de vue purement sentimental[1], tolstoïen, pacifiste bourgeois, ou même, ce qui est pis encore, on croirait parfois ne percevoir,

  1. La bataille syndicaliste, comme si ses lecteurs étaient de simples femmelettes aux nerfs sensibles, insiste avec complaisance sur les «horreurs de la guerre ». Mais les bourgeois pacifistes ne se font pas faute d’insister, eux aussi, sur les « horreurs de la Révolution », et l’on sait qu’à chaque grève les journaux bourgeois regorgent de statistiques où le bilan des pertes subies par les ouvriers est établi en grand appareil scientifique. Alors ?