Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 5-6, 1912.djvu/60

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec lui souvent difficiles. Ne recherchant pas son développement extérieur, vivant sur sa clientèle acquise, il ruse pour maintenir des bénéfices excessifs sur sa production, dont la qualité est inférieure ; il ruse pour gagner sur les matières premières.

Dans ses mœurs, le bourgeois clérical est dur. Il est dur pour lui-même et pour autrui. Sa discipline familiale est rigoureuse. Il ne tolère pas les écarts de conduite. Il convient de l’en louer. Mais il convient également de lui reprocher d’avoir rendu la bonne conduite peu aimable, et d’avoir employé, pour l’imposer autour de lui, des moyens parfois déplaisants. Il maintient énergiquement les contraintes sociales que détruit le bourgeois juif. Mais il les maintient en provoquant souvent soit la révolte, soit l’hypocrisie. Premièrement, il rend difficile l’acceptation des contraintes parce qu’il paie mal ses employés et ses ouvriers. Ensuite, sa contrainte apparaît parfois comme déterminée par son souci de maintenir les salaires à leur taux le plus bas. Il refuse d’employer des ouvriers et des employés irréligieux ou débauchés ; il veille à la moralité des garçons et des filles qu’il emploie. Nous sommes certain qu’il entre dans ce souci des bonnes mœurs une vraie et profonde horreur du péché. Mais l’on doit dire qu’il s’y mêle souvent des préoccupations purement économiques[1].

Fait plus grave : se tenant toujours sur la défensive, il est devenu retors, il a perdu le sens de la parfaite

  1. Mon ami, disait un grand bourgeois clérical à un de ses employés, je comprends fort bien que vous désiriez une augmentation de traitement. Mais réfléchissez bien à ceci : en acceptant un traitement peu élevé, vous augmentez vos chances de salut. Si j’augmente votre traitement, j’augmente pour vous les tentations. » Et il énumérait les tentations. Le raisonnement est juste. Mais il vient d’un homme qui manque par position de désintéressement dans la question. Selon que l’on sera bienveillant ou malveillant, on dira de cette réponse qu’elle est sublime ou odieuse.