Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 5-6, 1912.djvu/93

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C’est donc ainsi que nous pourrons poursuivre, malgré les charges que chacun de nous assume, une œuvre dont l’utilité nous a été largement démontrée par les résultats acquis. Nous tenons pour très important le résultat de nos premiers engagements avec les démocrates, par quoi nous avons repris Proudhon à ses « utilisateurs », à ses « exploiteurs » de la démocratie. Nous avons restitué au patrimoine français une source intellectuelle qui avait été troublée, détournée et gaspillée par les pillards internationaux. C’est une victoire. Elle a été attestée par un observateur que sa position destinait à l’impartialité contre nous, mais que sa loyauté obligeait à publier le vrai, M. Daniel Halévy. Elle a été attestée à l’étranger par un socialiste italien, M. Agostino Lanzillo, qui, dans une belle étude du Resto del Carlino, a repris à son compte les déclarations de M. Halévy et leur a donné d’amples développements en ce qui concerne notre œuvre : « Oui, dit M. Lanzillo après avoir reproduit nos premières déclarations, cette « diane » (questo aquillante diana di guerra) peut être sonnée au nom de Proudhon, parce qu’elle contient les éléments qui tous furent en germe dans l’esprit du grand penseur français, dont les pages les plus véhémentes sont dirigées contre la démocratie ». Victoire acquise, incontestée désormais, car les démocrates se sont enfin tus, et n’ont trouvé d’autre moyen de se rattacher à Proudhon qu’en se réunissant chaque mois en un dîner, auquel ils ont donné le nom de « dîner Proudhon » où les convives échangent les potins de Sorbonne et ceux du Parti unifié, et parlent de tout sauf de ce qui pourrait avoir quelque lien avec la pensée proudhonienne.

Nous tenons ce résultat pour fort important. Mais nos amis savent que nous nous sommes dévoués à une tâche plus large. Répétons encore que nous n’avons eu à aucun moment le propos de faire de t’exégèse proudhonienne. Nous voulons poursuivre dans notre siècle l’œuvre d’assainissement intellectuel et d’organisation sociale à laquelle Proudhon s’était donné, et c’est par nos œuvres propres et par notre action que nous prouverons que nous n’avons pas pris en vain le nom de notre patron, et que la tradition que nous avons retrouvée chez lui est bien la plus authentique tradition de la France classique.

C’est ce qu’à victorieusement démontré Henri Lagrange, exhumant les grandes pages de critique littéraire où Proudhon avait impitoyablement condamné les romantiques, de Rousseau à Georges Sand, et tous les critiques se sont associés aux fortes conclusions que Lagrange a données à l’étude qu’il a placée en tête de cette réédition (Émule de Nicolas Boileau, héritier spirituel des rois de France, Prou-