Page:Cahiers rationalistes - 1972 - n° 288-289 (extrait Hommage à Paul Langevin, La vie l’œuvre et l’action).djvu/10

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jusqu'alors comme illimitée — de la mécanique classique étaient d'une portée considérable.

Appelé dès 1904 à représenter la France au Congrès de Saint-Louis (USA) en même temps que le plus notoire savant français de ce temps, Henri Poincaré (de vingt ans son aîné), Paul Langevin y fait un brillant exposé d'ensemble sur « La Physique des électrons », montrant les perspectives que les notions nouvelles ouvrent alors à la science. Il conclut ainsi :

« Déjà toute l'optique reçoit une interprétation immédiate que la mécanique s'était montrée impuissante à lui donner ; et cette mécanique elle-même apparaît aujourd'hui comme une première approximation, largement suffisante dans tous les cas de mouvement de la matière prise en masse, mais dont une expression plus complète doit être cherchée dans la dynamique des électrons... La notion d'électron a pris en peu d'années un développement immense, qui lui fait briser les cadres de l'ancienne physique et renverser l'ordre établi des notions et des lois pour aboutir à une organisation qu'on prévoit simple, harmonieuse et féconde »[1].

Cet enthousiasme du jeune physicien ne fut certes pas dès lors partagé par tous ; certains, dont Henri Poincaré, se montraient fort réticents à devoir renoncer à la suprématie de cette mécanique rationnelle dont la puissance avait, pendant deux siècles, dominé toute la science. Cependant, par la hardiesse même de ses vues, par le rôle éminent qu'alors il joua dans le développement de la synthèse électromagnétique, Paul Langevin se situe dans la lignée des grands découvreurs qui, par Faraday, Maxwell, Hertz et Lorentz, permirent le passage de la remarquable construction newtonienne à la géniale intuition d'Einstein. Ainsi, mieux que tout autre était-il préparé à recevoir la révélation qu'apporta en 1905 l'énoncé du principe de relativité. En ce dernier domaine, l'enseignement de Paul Langevin s'éleva à la hauteur d'un véritable apostolat. Il est notoire que, sans lui, la diffusion des idées d'Einstein, devenues plus tard si fondamentales, notamment dans l'expérimentation en physique nucléaire, aurait été retardée de vingt ans au moins.

On sait que le principe de relativité restreinte implique l'

  1. Rapport présenté au Congrès de Saint-Louis le 22 septembre 1904, publié dans Paul Langevin, La physique depuis vingt ans (Doin, Paris, 1923).