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Page:Cailhava de l’Estandoux - L’égoïsme, 1777.djvu/14

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xiv
Préface.

du Spectateur au point où son exil excuse presque le desir qu’il a de garder pour lui seul les présens de l’oncle ; en vain ai-je pris la précaution de faire applaudir au portrait de l’Égoïsme dans deux expositions où il est peint bien plus en noir que dans le cours de l’action ; j’ai éprouvé que ce siècle étoit bien plus fécond en Égoïstes que celui de Molière en pieux imposteurs ; mais tout, jusqu’au dépit des originaux, m’a fait voir qu’il étoit tems de les démasquer.

Les gens superficiels font l’affront à Moliere de penser qu’il ne fait ressortir ses principaux personnages qu’en leur opposant des contrastes, & nombre d’Auteurs travaillent d’après ce principe ; il n’est point de plus grande erreur. Moliere connoissoit trop bien son Art pour mettre sous les yeux du Public deux Acteurs, qui par leur contraste parfait, seroient toujours de la même force, & partageroient par conséquent l’intérêt. Aussi, quand j’aurois pu trouver un personnage qui ne fît rien pour son intérêt, même pour son plaisir, je me serois bien gardé de l’introduire dans ma Piece. Le secret de mon Maître est de ne faire qu’opposer ses personnages à ses personnages. Pour qu’Harpagon fût le contraste parfait de Cléante, il faudroit que le dernier empruntât à usure, par prodigalité ;