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Page:Cailhava de l’Estandoux - L’égoïsme, 1777.djvu/66

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L’ÉGOÏSME,

Mais ne me dites pas que vous ne faites rien.
Depuis l’instant heureux où l’homme raisonnable,
Sentit le doux besoin de servir son semblable,
Et forma les liens de la société,
Elle aime, elle chérit l’homme de probité
Qui lui rend à son tour les secours qu’il en tire,
Qui, ne le pouvant pas, tout au moins le desire ;
Elle méprise & voit d’un regard irrité,
Ces frêlons importuns, nés de l’oisiveté ;
Qui, sans fournir de fonds, prétendent au partage,
Et des travaux d’autrui se font un appanage.
Tout augmente l’horreur que pour eux je ressens.

PHILEMON.

Comme j’aime à vous voir ces nobles sentimens !
Mon cœur s’enorgueillit d’en avoir de semblables.
J’abhorre, comme vous, ces êtres méprisables,
Qui se font & l’objet & le centre de tout ;
Par leur systême affreux ils me poussent à bout.
(Tirant Polidor à l’écart, & affectant un air modeste.)
Je n’ai pas toujours fait des recherches stériles ;
Et je rendrai, je crois, mes études utiles,
Si, remplissant jamais des postes importans,
Je puis aux malheureux consacrer mes momens…
Mais… sans fonds, point de charge…

POLIDOR, vivement.

Mais… sans fonds, point de charge…Il faut en chercher une. —
Mes enfants, je croirois n’avoir pas fait fortune,
Si je ne savois pas à propos m’en servir ;
Plus agréablement je ne puis en jouir,
Qu’en vous portant au bien. — Enfin, voyons mon Frere.