C’est vous, don Arias, et vous vous taisez !
Un moment, madame, et vous serez satisfaite. — Sire, que votre majesté me permette de dire quelques mots ; c’est à moi qu’il appartient de défendre l’honneur de cette dame. Cette même nuit dont il est question, une femme avec laquelle je me serais marié, si depuis la Parque cruelle n’eût tranché le fil de ses jours, était allée rendre visite à doña Léonor. Moi, je suivis ses pas, et j’entrai dans la maison de doña Léonor sans qu’elle pût s’y opposer. Alors arriva don Gutierre. Aussitôt doña Léonor, éperdue, m’ordonna de me retirer dans une pièce voisine. J’obéis… maudit soit celui (quoique je ne veuille pas me maudire) qui écoute les vaines craintes d’une femme ! J’entendis bientôt la voix de don Gutierre et les pas qui approchaient. Je m’imaginai qu’il était le mari de la maîtresse de la maison, et je pris la fuite. Je ne devais pas moins à l’honneur compromis d’une dame. Mais puisque aujourd’hui je vois que don Gutierre n’était pas le mari de doña Léonor, et qu’elle n’a pas manqué à ce qu’elle est, que votre majesté m’accorde le champ où je défende une si juste, si noble et si belle cause. La loi le concède aux chevaliers.
Je me présenterai. En quel lieu ? à quelle heure ?
Marchons !
Je vous suis !
Comment ! vous mettez la main sur vos épées en ma présence ! Vous avez donc oublié tout respect ? Il y a donc de la fierté là où je suis ? (Il appelle.) Holà ! hommes d’armes ! (Entrent des soldats.) Qu’on les emmène prisonniers, et qu’on les mette à la Tour ! — Remerciez-moi l’un et l’autre de ce que je ne vous châtie pas autrement.
Si Léonor a perdu par moi sa renommée, elle la retrouvera par moi aussi. On ne m’accusera pas d’avoir mal défendu l’honneur d’une dame.
Ce qui m’afflige, ce n’est pas de voir le roi si sévère et si cruel ; ce qui m’afflige, c’est de ne pas te voir aujourd’hui, ô Mencia !
Voila don Gutierre prisonnier ! Cette nuit, parti sous le prétexte