Eh bien ! Henri, si votre amour ne se décourage pas de poursuivre une beauté rebelle sur laquelle un gentilhomme possède un souverain empire, prenez-y garde, le sang royal lui-même n’échapperait pas à ma justice.
Je vous comprends, sire, à cette heure ; mais souffrez que je me défende. Un juge doit écouter également les deux parties ; la justice le commande, et l’on vous a surnommé le Justicier. Je vous dirai donc, sire, que j’ai autrefois aimé une femme, celle dont vous voulez parler sans doute ; je l’ai aimée à tel point que…
Qu’importe, si elle est une beauté rebelle ?
Je l’avoue ; mais pourtant…
Taisez-vous, infant !
Permettez-moi du moins de me défendre.
Vous n’avez pas à vous défendre, si cette dame est une beauté rebelle.
J’en conviens de nouveau ; mais le temps et l’amour sont bien puissans sur un cœur.
Taisez-vous, infant, taisez-vous ! (À part.) Dieu me pardonne ! j’ai eu tort de faire cacher Gutierre.
Ne vous échauffez pas contre moi. Vous ne savez pas les motifs qui m’autorisent à en agir ainsi.
Je sais tout, je sais tout ; c’est assez.
J’ai le droit de parler, sire, quand je suis accusé. Cette femme, je l’ai aimée quand elle était demoiselle…
Ah ! malheureux !…
Et elle a reçu mes hommages…
Hélas ! hélas !
Et avant d’être l’épouse de cet homme à qui elle appartient aujourd’hui…