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LA DÉVOTION À LA CROIX.

curcio.

Qu’est-il arrivé ?

octavio.

Julia a quitté son couvent.

curcio.

Mon malheur, je l’avoue, est plus grand que je n’aurais jamais pu l’imaginer. — Ce cadavre que tu vois, Octavio, ce froid cadavre, c’est mon fils… et tu m’annonces que ma fille Julia… Crois-tu qu’un mortel puisse supporter tous ces maux, réunis ?… Ô ciel ! donne-moi la force nécessaire, ou délivre-moi d’une si triste vie.


Entre GIL.
gil.

Soigneur ?

curcio.

Eh bien ! quoi encore ?

gil.

Les brigands que vous avez mis en fuite reviennent à votre recherche, animés par un démon ou par un homme qui leur cache à eux-mêmes son visage et son nom.

curcio.

Après tous mes malheurs, je ne crains plus rien. — Que l’on mette de côté le corps d’Eusebio, jusqu’à ce que je puisse donner à ses restes un tombeau convenable.

tirso.

Et comment pensez-vous pouvoir l’ensevelir dans un lieu consacré ? Ne savez-vous pas qu’il est mort excommunié ?

blas.

À un homme qui est mort de la sorte, ce désert ne sera t-il pas une bien digne sépulture ?

curcio.

Ces vilains, ces rustres, ils conservent si bien le ressentiment d’une injure, que la mort même ne satisfait pas leur vengeance !

Il sort désespéré.
blas.

Ce brigand ne doit avoir d’autre tombeau que le corps des bêtes féroces et des oiseaux de proie.

un autre paysan.

Précipitons son cadavre du haut de la montagne, afin de le mettre en lambeaux.

tirso.

Il vaut mieux lui donner une sépulture rustique sous ces branchages. (Les paysans enterrent Eusebio.) Maintenant, comme la nuit baisse, partons.. Toi, Gil, reste ici ; et si tu vois venir quelques-uns des fuyards, tu nous avertiras en criant.

Ils sortent.