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DE MAL EN PIS.

don juan.

Non pas, s’il vous plaît. Il n’est pas juste que je vous tire d’ici pour vous exposer à un danger, et qu’après je vous quitte.

don césar.

Je desirerais cependant…

don juan.

Ne vous en défendez pas, je vous accompagnerai.

don césar, à part.

Cruelle situation !… Ne serait-ce pas à moi une véritable indélicatesse de souffrir qu’il veille sur mon rendez-vous et qu’il trahisse, même à son insu, un hôte à qui il doit tant ?

don juan.

À quoi pensez-vous là ?

don césar.

C’est que, voyez-vous, don Juan…

don juan.

Qui vous arrête encore, dites ?

don césar.

Vous croirez peut-être que je suis un ingrat de me cacher de vous dans mes amours… Vive le ciel ! Pylade n’a pas eu plus d’attachement pour Oreste, ni Euryale pour Nisus, que je n’en ai pour vous… Après cette assurance, souffrez que, malgré mon bon vouloir, je ne vous dise pas quelle est ma dame, — car cela m’est, en vérité, impossible, — et permettez que j’aille seul chez elle.

don juan.

Je serais importun si j’insistais davantage. (À part.) La ridicule discrétion et le sotte méfiance ! (Haut.) Adieu, don César.

don césar.

Adieu, don Juan.

don juan.

Bonne chance !

Il sort.
don césar.

Camacho ?

camacho.

Seigneur ?

don césar.

Prépare-moi avec soin un pistolet.

camacho.

En voici un que j’ai arrangé de mon mieux pendant que vous causiez ; mais voyez s’il est bien en état.

don césar.

Très-bien ; la pierre… la bourre… l’amorce, rien n’y manque

camacho.

Et les ressorts jouent-ils bien ?