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MAISON À DEUX PORTES

MAISON DIFFICILE À GARDER


(CASA CON DOS PUERTAS MALA ES DE GUARDAR.)



NOTICE.


Plusieurs comédies de Calderon ont pour titre un proverbe qu’elles semblent destinées à justifier par le dénouement. Le but manifeste que se propose alors l’auteur, ainsi qu’on l’a dit avec raison, contribue à l’intérêt de cette sorte de drames.

Le poète qui a été si bien inspiré en traitant — La Vie est un songe, ou — Défiez-vous des apparences, devait être tenté par — Maison à deux portes, etc., etc. Le choix de ce sujet était heureux, et il l’a traité avec sa supériorité habituelle.

Une critique exacte aurait sans doute quelque droit de reprocher à Calderon de n’avoir pas motivé suffisamment sa comédie ; en effet, on ne sait pas trop, au premier abord, pourquoi les deux couples d’amans courent tant d’aventures avant de se marier, lorsqu’il n’y avait pas de plus sérieux obstacle à leur mariage. Mais ce défaut serait, selon nous, bien compensé par tous les mérites divers qui brillent dans cette œuvre de Calderon : dans l’ensemble, par l’originalité, la rapidité et la clarté de l’intrigue ; dans le détail, par la verve, l’esprit et la facilité du dialogue, et aussi par l’admirable richesse d’une poésie pleine d’images et d’harmonie, que, malheureusement, le traducteur ne saurait se flatter d’avoir reproduite.

On peut dire en somme que, dans cette comédie comme dans la plupart de ses comédies d’intrigue (ou comédies de cape et d’épée), Calderon n’a peint que des caractères généraux. Depuis Calabazas, le valet-bouffon, qui est gourmand, curieux et poltron, jusqu’à Fabio, le vieillard ou père noble, qui est si prudent et qui tient tant à l’honneur de sa maison, tous ses caractères n’ont rien qui les distingue particulièrement de l’espèce à laquelle ils appartiennent. Cependant, après une étude attentive de notre comédie, il nous paraîtrait que les deux galans ne se ressemblent pas complètement l’un à l’autre, et que les deux dames ont chacune des traits qui leur sont propres… Peut-être cette différence que nous trouvons dans les caractères des personnages principaux n’est-elle pas essentielle et qu’elle tient seulement à la différence de leur situation… Au reste, nous donnons cette observation pour ce qu’elle vaut, sans y attacher d’autre importance.

On remarquera sûrement, dans la première journée, la scène où don Félix, introduit par Celia auprès de Laura, ne devinant pas que la maîtresse et la suivante sont d’accord, s’excuse tant qu’il peut d’être entré là malgré elles.