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MAISON À DEUX PORTES.

don félix.

Quoi ! prétendriez-vous vous excuser ?

laura.

Oui, je le prétends.

don félix.

J’ai donc mal vu, moi ?

laura.

Qu’avez-vous vu ?

don félix.

Un homme qui était là dans votre chambre.


Entre CELIA.
laura.

C’était peut-être quelque domestique.

celia, sans voir don Félix.

Il est dans la rue, madame !

don félix.

Eh bien !… c’était peut-être quelque domestique ?

celia.

Comment ! le seigneur don Félix encore ici !

laura.

Hélas ! toutes les apparences m’accusent… Il faut que j’aie bien du malheur, puisque je suis innocente.

don félix.

Sans doute, c’est moi qui suis coupable !

laura.

Je vous estime et je vous aime tant, don Félix, malgré votre sévérité, que je ne vous dirai pas ce qui m’absout, de peur de vous affliger…

don félix.

Voilà une merveilleuse délicatesse !… C’est ainsi qu’on se défend quand on n’a rien à répondre. Enfin, Laura, adieu.

laura.

Considérez, je vous prie…

don félix.

Lâchez-moi !

laura.

Vous ne vous en irez pas ainsi, don Félix.

don félix.

Vive Dieu ! si vous me retenez, je pousse un cri tel que je réveille votre père et que je lui dis qui vous êtes.

laura.

Don Félix, votre langage est bien cruel.

don félix.

Ni m’obligez pas à perdre le respect que je dois à votre beauté : la jalousie tue le respect. — Adieu !

Il sort.