ni ne servez aucune dame[1]. Et pour que vous connaissiez toute ma disgrâce…
Achevez, don César ; vous m’inquiétez.
Le duc a appris que le prince d’Urbin était arrivé en secret à Milan, où il vient, j’imagine, prendre le commandement des troupes de l’Empire contre les Suisses ; et comme il est fort de ses amis et son proche parent, il m’envoie avec cette lettre lui présenter son compliment de bienvenue, et m’a ordonné de partir à l’instant même. Vous concevez sans peine l’embarras où je me trouve : car si je ne pars point, je m’expose à perdre les bonnes grâces du duc, et si je pars, je perds l’occasion que j’ai le plus souhaitée en ma vie ; d’autant que Violante, ignorant le motif et la nécessité de cette absence, pourra croire que je veux par là me venger de ses anciens mépris, et reprendra contre moi une haine que l’orgueil blessé rendra cette fois inflexible.
Je n’ai qu’une chose à vous dire ; c’est que vous pouvez, sans qu’on le sache, rester ici jusqu’à demain, et que de bons chevaux de poste vous feront regagner le temps perdu.
Cela est impossible, car le duc m’a commandé de partir en poste sur-le-champ, et dans un voyage de six jours en perdre deux est beaucoup.
Eh bien ! vous pouvez avertir Violante en lui exprimant tous vos regrets.
Je puis, en effet, m’excuser auprès d’elle ; mais tout cela ne me rendra pas l’occasion que j’avais pour demain, grâce à l’absence de son père.
Mais que dit la lettre ?
Que voulez-vous qu’elle dise ?… ce sont les complimens ordinaires.
Y êtes-vous nommé ?
Oui suivant l’usage, sous cette formule : « César Farnèse, mon cousin, va en mon nom, etc., etc. » C’est le style usité, afin que la personne à qui l’on adresse la lettre sache les égards qu’elle doit a la personne qui la porte.
- ↑ Il y a ici dans l’original une grâce intraduisible. Elle tient à la ressemblance qu’à le nom de Félix avec le mot feliz, qui signifie heureux.