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JOURNÉE II, SCÈNE II.

port, un vaisseau prêt à vous recevoir. Par le soupirail de votre cachot je vous jetterai ce qu’il faut pour rompre vos chaînes je briserai en dehors les cadenas des portes, et avec tous les captifs que contiennent les bagnes de Fez, vous pourrez sortir et retourner dans votre pays. Il n’y a aucun péril à craindre pour moi ; on croira aisément que vos forces réunies ont suffi à briser vos fers ; et je m’acquitterai ainsi des obligations contractées envers vous. D’ailleurs, quand bien même le roi devrait connaître mon dessein et me condamner comme traître, une telle mort n’a rien qui m’épouvante… Et l’or vous étant nécessaire pour vous concilier la faveur de quelques gardiens ; je vous apporte ces bijoux, qui sont d’une grande valeur. Ce sera là, don Fernand, la rançon de votre prisonnier. Ainsi, je m’acquitte de ce que je vous dois. Ainsi devait un jour se racheter un captif loyal et fidèle.

don fernand.

Je voudrais vous remercier, mais le roi paraît.

muley.

Nous a-t-il vus ensemble ?

don fernand.

Je ne pense pas.

muley.

Ne lui laissons rien soupçonner.

don fernand.

Pendant qu’il passe, je vais me dérober à ses regards derrière les branches de ces arbres.

Il se cache.


Entre LE ROI.
le roi, à part.

Muley et Fernand causant seul à seul ! Et dès qu’ils me voient, l’un disparaît et l’autre dissimule ! J’ai ici quelque chose à craindre… et que mes soupçons soient fondés ou non, je veux me rassurer. (Haut.) Je me félicite, mon ami…

muley.

Je me mets à vos pieds, seigneur.

le roi.

De te trouver ici.

muley.

Qu’ordonnez-vous ?

le roi.

J’ai été affligé de voir que Ceuta ne rentrait pas sous mon obéissance.

muley.

Allez, le front ceint de laurier, allez à sa conquête. Elle ne pourra résister à votre valeur.

le roi.

Je veux la soumettre par une guerre moins sanglante.