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JOURNÉE II, SCÈNE III.

sement. » (Parlant.) Vous en faut-il davantage, seigneur juge pour apprécier cet homme et son témoignage ? Il est si infâme qu’il avoue froidement être demeuré tranquille en voyant consommer un assassinat ! Vive Dieu ! il en a menti ! — Continuons. (Lisant.) « Que don Alonzo monta à cheval et s’enfuit ; que Louis Perez, ne pouvant en faire autant, se battit contre la justice, tua et blessa plusieurs personnes. » — (Parlant.) C’est un juif ! — Permettez, seigneur, que j’emporte cette feuille ; je m’engage à la rapporter en temps utile. (L’arrachant.) Je veux faire confesser la vérité à ce chien maudit… quoique, à vrai dire, il n’y eût rien d’étonnant à ce qu’il ne sût pas faire une confession, car il n’y a pas longtemps qu’il l’apprend. — Si les juges doivent prononcer sur les dépositions, ce ne doit pas être du moins sur de faux témoignages ; et ils doivent, en outre, entendre ce que l’accusé peut dire à sa décharge. Que votre seigneurie considère que je n’ai pu commettre de délit alors que j’étais tranquillement devant la porte de ma maison. Le malheur est venu m’y chercher, il n’a pas dépendu de moi de le fuir ; et l’homme juste, vous le savez, comprend et excuse un malheur amené par les circonstances.

une voix, du dehors.

L’homme qui est là dedans est Louis Perez, maintenant que nous sommes en force, entrez, et prenez-le.

manuel, du dehors.

Je suis ici pour le défendre.

louis.

Laissez-les entrer, Manuel. Peu m’importe à présent, car je sais ce que je voulais savoir ; et vous verrez que, parfois, ceux qui entrent par la porte, peuvent bien sortir par la fenêtre.

une voix, du dehors.

Arrêtez-le !

le juge.

Rendez-vous, Louis Perez, — et je vous promets, foi d’homme de bien, que vous aurez toujours en moi un ami.

louis.

Je ne cherche pas mes amis parmi les gens de robe. Ils ne se croient pas obligés par leur parole, et ils font les lois en conséquence.

le juge.

Songez-y bien ; si vous ne vous rendez, vous êtes mort.

louis.

Tuez-moi donc, si vous pouvez.

le juge.

Croyez-vous donc que cela me soit difficile ?

louis.

Oui ; car j’ai mon bras pour me défendre.