Page:Calderón - Théâtre, trad. Hinard, tome III.djvu/95

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
85
JOURNÉE II, SCÈNE II.

Il faut que je parle tout de suite ; fais préparer sans retard deux chevaux. — Les chevaux sont prêts. — Maintenant je ne pars plus ; mais viennent tout de même les chevaux, et monte celui-ci. — M’y voilà. — Qu’avons-nous fait ? — Une lieue. — Eh bien ! retournons. — Eh bien ! retournons. — Cela suffit. — C’est bien. — Et puis : Va-t’en, rentre à la maison, ne me suis pas… El tant de petites méfiances, de petits mystères et de petits secrets, que le diable lui-même s’y perdrait. Et pour moi, enfin, je ne veux plus servir un maître qui, sans être pape, a ainsi des cas réservés.

frédéric.

Tais-toi, voici son altesse. Et songe bien, je te le répète, que personne jamais ne sache que je n’ai point quitté Parme cette nuit.

Il sort.
fabio.

Certainement. (À part.) J’enrage de parler, et je parlerai pour trois raisons. Primo d’abord, pour régaler cette mienne langue ; en second lieu, pour me venger de mon maître ; et troisièmement, pour rendre service à la duchesse.

Il sort.

Scène II.

Une autre partie du jardin.
Entrent LA DUCHESSE et LAURA.
la duchesse.

Enfin, Laura, vous m’assurez que personne n’est descendu cette nuit au jardin ?

laura.

Combien de fois faut-il vous le dire ?

la duchesse.

Encore une seulement.

laura.

Eh bien ! madame, je vous répète que j’y suis restée jusqu’au moment où l’aurore a paru couvrant de perles toutes ces fleurs charmantes, et je n’ai aperçu personne ; de sorte que vous ne pouvez soupçonner qui que ce soit au monde, excepté moi.

la duchesse.

J’ai d’autres soupçons, Laura.

laura.

Lesquels ?

la duchesse.

C’est que la dame aura été avertie du départ de Frédéric, et, qu’en conséquence, elle ne devait pas descendre au jardin. — Mais n’importe. J’ai toujours cette consolation que je les ai empêchés de se voir et de se parler cette nuit.