Où va don César ?
Eu enfer probablement, mais je n’en sais rien.
Attendez-moi ici un moment ; je vais chercher ce qu’il lui faut. (À part.) Ô ciel ! le duc a peut-être appris que Lisardo était à Milan, et c’est pour cela qu’il le fait partir.
Je ne sais comment je n’étouffe pas de dépit… C’est ainsi que don César me délaisse ! Lui si constant et si fidèle lorsque je ne lui montrais que du dédain, c’est ainsi qu’il reconnaît ma bonté !
Maintenant que je puis parler, madame, écoutez-moi, et vous verrez que tout en venant ici pour faire un recouvrement, je viens ici pour vous payer ce qu’on vous doit. Don César m’envoie vers vous avec ce billet.
Prenez-le, et vite, car voici mon maître qui revient.
Je crains qu’il ne m’ait vue, et je tremble.
Prenez, et Dieu vous conduise[1] !
Qu’il vous conserve une éternité de siècles !… et remarquez, mon seigneur, que cette fois je ne compte pas[2]. (À part.) Je m’en vais mieux dépêché que je ne croyais ; car enfin j’ai remis le billet, et je sors avec de l’argent et point de coups de bâton.
Si mon père avait vu le billet !
C’est impossible ; il en aurait témoigné son mécontentement.
Ma fille, je vais demain, comme vous le savez, à ce village.
Que je suis heureuse ! il ne se doute de rien, puisqu’il pense à son voyage.
- ↑ Cette locution id con Dios, allez avec Dieu, ou, Dieu vous conduise, se reproduit fréquemment dans les comédies espagnoles. Bien qu’au premier abord elle puisse sembler un peu étrange à des personnes d’un goût délicat, nous avons cru devoir la reproduire quelquefois parce qu’elle a quelque chose de religieux, qui est tout-à-fait dans les idées et dans les habitudes espagnoles.
- ↑ Encore un jeu de mots intraduisible sur le verbe contar, qui signifie tout à la fois compter et conter une histoire.