Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/137

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cela suffit : je sais aussi que vous êtes incapable de faire, auprès de moi, pour le desservir, des tentatives qui seraient d’ailleurs inutiles ; je lui suis trop anciennement attachée. Soyez, de votre côté, bien rassuré sur l’inimitié de l’abbé qui ne pourra vous nuire en aucune manière. Nous ne risquons de faire des choses injustes, que lorsque les personnes qui nous environnent ont l’art perfide de nous déguiser les motifs de haine ou d’ambition qui les font agir. » L’abbé de Vermond, s’étant assuré dans l’intérieur de la reine le poste de confident unique, était cependant tremblant aussitôt qu’il apercevait le jeune monarque. Il ne pouvait ignorer qu’il était placé par le duc de Choiseul, et taxé de tenir aux encyclopédistes contre lesquels Louis XVI avait une secrète prévention, malgré l’ascendant qu’il leur a laissé prendre sous son règne. L’abbé jugeait donc qu’il ne devait pas être agréable au roi. Il avait de plus observé que jamais, étant dauphin, ce prince ne lui avait dit une seule parole ; et que, très-souvent, il

    sur cette décision, et parla très-favorablement de l’esprit de M. Moreau ; mais la princesse était si prévenue contre lui, qu’elle insista pour que sa volonté fût exécutée, et ajouta qu’elle en parlerait au roi ; qu’elle savait que M. Moreau avait tant d’esprit qu’il l’avait double, et qu’elle ne voulait que des gens sûrs auprès d’elle. Jamais le bibliothécaire historiographe ne reparut chez la reine. Il est probable qu’on avait fait connaître à madame la dauphine les liaisons de M. Moreau avec le duc d’Aiguillon et quelques autres personnes du parti de ce ministre.

    (Note de madame Campan.)