Aller au contenu

Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/262

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

enfermée dans ses cabinets pendant plusieurs jours, ne sortit que pour entendre la messe, ne vit que la famille royale, et ne reçut que la princesse de Lamballe et la duchesse de Polignac. Elle ne cessait de parler du courage, des malheurs, des succès et des pieuses vertus de sa mère. Les sentimens d’humilité chrétienne n’avaient jamais abandonné cette princesse ; son linceul et les vêtemens qui devaient servir à l’ensevelir, faits entièrement de sa main, se trouvèrent préparés dans un de ses cabinets. La reine ne trouvait dans son affliction d’autre soulagement que de s’entretenir de cette mère chérie ; elle était parfaitement instruite des événemens divers qui illustrèrent le règne de l’impératrice, et de toutes les qualités qui la rendaient chère à sa famille, à son intérieur et à ses peuples. Elle témoignait souvent le regret qu’elle éprouvait en pensant que les nombreux devoirs de son auguste mère l’avaient empêchée de veiller elle-même à l’éducation de ses filles, et disait, avec modestie, qu’elle aurait valu beaucoup mieux si elle avait eu le bonheur de recevoir directement des leçons d’une souveraine aussi sage et aussi digne d’admiration[1].

J’écris ces pages bien long-temps après avoir été

  1. Sans affaiblir la haute idée qu’on doit avoir des vertus et du caractère de Marie-Thérèse, on ne peut nier que la morale ne réprouve certains actes de sa politique. La complaisance ou la faiblesse des autres cabinets de l’Europe ne pouvaient lui servir