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Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/200

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nuscrit pour mille louis, s’il pouvait trouver quelque amie de la reine disposée à faire ce sacrifice à sa tranquillité ; qu’il avait pensé à moi, et que, si Sa Majesté voulait lui donner les vingt-quatre mille francs, il me remettrait le manuscrit en les touchant.

Je communiquai cette proposition à la reine qui la refusa et m’ordonna de répondre que, dans les temps où il eût été possible de punir les colporteurs de ces libelles, elle les avait jugés si atroces et si invraisemblables, qu’elle avait dédaigné les moyens d’en arrêter le cours ; que, si elle avait l’imprudence et la faiblesse d’en acheter un seul, l’actif espionnage des jacobins pourrait le découvrir ; que ce libelle acheté n’en serait pas moins imprimé, et deviendrait bien plus dangereux, quand ils apprendraient au public le moyen qu’elle avait employé pour lui en ôter la connaissance.

Le baron d’Aubier, gentilhomme ordinaire du roi et mon ami particulier, avait une mémoire facile et une manière précise et nette de me transmettre le sens des délibérations, des débats, des décrets de l’Assemblée nationale. J’entrais chaque jour chez la reine, pour en rendre compte au roi qui disait en me voyant : « Ah ! voilà le postillon par Calais[1]. »

Un jour M. d’Aubier vint me dire : « L’Assemblée

  1. Nom d’un journal du temps.