Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/215

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

saient : « Sire, ne craignez rien. » On sait la réponse du roi : « Mettez la main sur mon cœur, vous verrez si j’ai peur. » M. Vanot, commandant de bataillon, avait détourné l’arme d’un scélérat, dirigée contre la personne du roi ; un grenadier des Filles-Saint-Thomas para un coup d’épée dont la direction annonçait le même dessein. Madame Élisabeth était accourue chez son frère. Dès la porte de la chambre, elle entend des cris de mort contre la reine : on demande la tête de l’Autrichienne. « Ah ! laissez-leur croire que je suis la reine, dit-elle à ceux qui l’environnaient, afin qu’elle ait le temps de se sauver. »

La reine n’avait pu parvenir jusqu’au roi ; elle était dans la salle du conseil, et on avait eu de même l’idée de la placer derrière la grande table, pour la garantir, autant que possible, de l’approche de ces barbares. Dans cette horrible situation, conservant un maintien noble et décent, elle tenait le dauphin devant elle, assis sur la table. Madame était à ses côtés ; madame la princesse de Lamballe, la princesse de Tarente, mesdames de La Roche-Aymon, de Tourzel et de Mackau, l’environnaient. Elle avait attaché à sa tête une cocarde aux trois couleurs, qu’un garde national lui avait donnée. Le pauvre petit dauphin était, ainsi que le roi, affublé d’un énorme bonnet rouge[1].

  1. « Une des circonstances de la journée du 20 juin, qui avait le plus affligé les amis du roi, dit Bertrand de Molleville, étant