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pièces qui appartenaient à l’archiviste Camus, où était le roi avec sa famille.

En entrant dans la première pièce, une personne qui y était me dit : « Ah ! vous êtes une brave femme ; mais où est ce Thierry[1], cet homme comblé des faveurs de son maître ? — Le voici, dis-je, il me suit, et je vois que même les scènes de mort ne bannissent pas ici le sentiment de la jalousie. »

Attachée à la cour dès ma plus tendre jeunesse, j’étais connue de beaucoup de gens que je ne connaissais pas. En traversant un corridor au-dessus du cloître, et qui conduisait aux cellules habitées par l’infortuné Louis XVI et sa famille, plusieurs grenadiers s’adressèrent à moi, en m’appelant par mon nom. Un d’eux me dit : « Eh bien ! le voilà perdu le pauvre roi ; le comte d’Artois s’en serait mieux tiré. — Pas mieux, » dit l’autre.

La famille royale occupait un petit appartement composé de quatre cellules des anciens Feuillans. Dans la première, étaient les hommes qui avaient suivi le roi : M. le prince de Poix, M. le baron d’Aubier, M. de Saint-Pardou, écuyer de madame Élisabeth, M. Goguelat, MM. de Chamilly et Hue. Dans la seconde pièce, nous trouvâmes le roi. On lui rafraîchissait les cheveux ; il en prit deux mè-

  1. M. Thierry, qui ne cessa jamais de donner à son souverain les preuves du plus respectueux et du plus fidèle attachement, fut une des victimes du 2 septembre.
    (Note de madame Campan.)