Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/54

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de rester à Versailles, qu’il y aurait sûrement du bruit le lendemain, parce qu’elle savait que l’on avait semé beaucoup d’écus dans les faubourgs[1].

Le 14 juillet au soir, le roi était entré chez la reine, comme j’étais seule avec Sa Majesté ; il lui parlait des soupçons affreux que les factieux de l’Assemblée avaient fait répandre, en disant qu’il avait fait miner la salle des états-généraux, pour la faire sauter ; mais il ajouta qu’il devait continuer à mépriser une semblable ineptie : je me permis de lui dire que j’avais soupé la veille avec M. Begouen, député, qui avait dit que des personnes fort estimables pensaient que cet horrible moyen avait été suggéré à l’insu du roi. « L’idée d’une semblable atrocité n’a pas révolté un homme aussi vertueux que Begouen, dit alors Sa Majesté ; demain matin, de bonne heure, j’ordonnerai que l’on fasse fouiller dans la salle. » On voit, en effet, par le discours du roi à l’Assemblée nationale le 15 juillet, que les soupçons qu’on avait semés méritaient son attention. « Je sais, dit-il dans ce discours, que l’on a répandu d’injustes soupçons, je sais qu’on a osé publier que vos personnes n’étaient pas en

  1. J’ai vu un écu de six francs qui avait sûrement servi de paiement à quelque misérable, la nuit du 12 juillet ; on y lisait ces mots gravés assez profondément : Minuit, 12 juillet, trois pistolets. C’était sans doute un mot d’ordre pour cette première insurrection.
    (Note de madame Campan.)