Que la bonté du ciel est grande, ma chère Élisa, de m’avoir accordé de vieux jours pour me rendre témoin de votre bonheur et de celui de mon neveu ! Dieu récompense en vous les vertus de vos estimables parens ; il est le protecteur des familles qui respectent sa sainte loi. Fidèle à l’amitié, votre père risqua ses jours pour sauver à son général une partie de sa fortune ; il y parvint : mais, bientôt après, il périt en défendant son pays. Après sa mort, votre mère, convaincue qu’il n’y avait plus rien qui dût l’attacher à la vie que le soin de ses enfans, se dévoua à la retraite, et destina presque tout son revenu à l’éducation de votre frère. Pour vous, mon Élisa, elle ne put que vous rendre témoin de ses vertus domestiques ; mais elle vous apprit à vivre de peu, sans penser à des jouissances qui deviennent criminelles lorsqu’on ne les obtient qu’en contractant des dettes ; elle vous donna le goût de l’ordre et de la propreté, parure de la médiocrité ; elle forma votre jugement, et hâta le développement de votre raison : tant de vertus