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prophétie


Nous sortîmes de là, sans avoir pénétré
Le mystère profond de nos doubles fortunes,
Mais la brise était fraîche et caressait la dune
Et le soleil riait sur les flots azurés.

Nous nous sentions heureux de la beauté des choses,
Nous allions, devisant tout le long du chemin,
Pourquoi vouloir chercher ce que sera demain ?
Demain, nous irons voir s’il est encor des roses !

Serait-ce un sort plus doux que d’avoir su prévoir
Sans jamais écarter le destin qui nous presse
Chaque jour de bonheur, chaque jour de tristesse,
Jusqu’au dernier frisson de notre dernier soir !

Non. — Laissez les secrets que l’avenir recèle,
Vous qui, dès aujourd’hui, possédez de tels biens,
Un cœur pur, sans lequel tout le reste n’est rien :
Le bonheur d’être jeune et celui d’être belle.

Puissiez-vous ignorer ces instants douloureux
Où l’âme, dans la nuit, palpite et bat de l’aile.
S’il en était pour vous, je serai là, fidèle,
Ceci du moins est sûr, si le reste est douteux.