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temps dans les écuries de M. Normandeau. Je soigne les chevaux et je veille à l’entretien des harnais et des voitures. C’est pas pour me vanter, mais, babiche ! je vous certifie que tout ça est à l’ordre. Or, en face de l’écurie qui touche à la rue, il y a, depuis deux ans, un restaurant appelé le « Saumon d’or, » qui sert de rendez-vous à la jeunesse crapuleuse de la ville. Ce restaurant est tenu par une femme à l’âme malpropre, à ce qu’on dit, mais, moi, je ne la connais que de figure, et ça m’en dit assez !

Souvent, le soir, le clerc notaire arrive au restaurant dans un carrosse traîné par deux chevaux. Souvent aussi je l’entends dire, à la porte du « Saumon d’or, » à ses amis : « C’est moi qui paye toutes les dépenses ce soir ! » Une fois même, il y a deux ou trois mois de ça, je lui ai entendu dire : « Il me reste encore dix dollars sur les cinquante que mon imbécile de frère m’a donnés ! nous allons les boire à sa santé ce soir ! »

Le père François, dans la voiture, trépignait de colère et d’indignation…

Le gueux ! ah ! le gueux ! répétait-il… Et dire que sa famille s’imagine que ce gueux-là est le modèle des étudiants !

— Vous connaissez donc sa famille ? interrogea Philippe.