Page:Capus – Qui perd gagne.djvu/198

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Cette promenade les rendit songeurs. Emma murmura, en revenant :

— Serions-nous bien, tous les deux, ici, dis, mon chéri ? Ah ! si jamais tu gagnais deux cents ou deux cent cinquante mille francs…

— Trois cent mille, dit Farjolle, il nous faudrait trois cent mille francs…

— Nous n’habiterions plus Paris, plus du tout… Une centaine de mille francs pour une belle propriété dans le genre de celle-ci ; le reste pour bien vivre, tranquillement nous deux, sans tracas… Je déteste Paris, il m’y est toujours arrivé des désagréments.

— Ce n’est pas commode de gagner trois cent mille francs aujourd’hui… mais ce n’est pas impossible.

— En faisant des économies, dit Emma.

— Ce n’est pas une question d’économies, ajouta Farjolle, c’est une question de veine. Dans mon métier, on ne peut pas économiser trois cent mille francs ; il y a trop de haut et de bas, de secousses, de désordres ; seulement, on peut les gagner d’un coup ou en très peu de temps. Il n’y a que les gens qui exercent un métier régulier qui sont à même de réaliser des économies.

Le rêve de cette fortune les passionnait. Farjolle avait grand espoir dans sa nouvelle idée, un journal financier, l’appui de Letourneur, de Verugna, de Moussac, c’est-à-dire de grosses chances aux mains d’un homme qui saurait spéculer prudemment.

L’été finissait. Farjolle allait à Paris presque tous les jours, laissant sa femme qui se plaisait à la campagne. Vers le milieu de septembre, ils commencèrent de déménager. L’appartement de la rue Taitbout était libre : ils l’occupèrent aux premiers jours d’octobre. Emma fut