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qui perd gagne

mille francs d’Emma constituaient les deux tiers à peu près de ses économies. Il se décida à les perdre pour la posséder encore.

Depuis la scène de la rue Clément-Marot, le souvenir d’Emma l’obsédait. Rien n’avait pu faire disparaître l’impression de ces heures où il la serrait éperdument entre ses bras. Il ne se couchait pas une nuit dans son lit, sans se rappeler qu’elle y avait été étendue à son côté, sans revoir la façon dont elle se déshabillait. Elle se déshabillait lentement, rangeait avec soin ses jupons et sa robe. Jamais elle ne voulut qu’il l’aidât et lui permettait seulement de déboutonner ses bottines. Alors, elle montait sur le lit en souriant.

Après six mois, les moindres détails revenaient troubler son esprit. Aucune autre femme ne put le divertir. Il chercha, dans des cafés de nuit, des filles qui ressemblaient vaguement à Emma et éprouva des désillusions. Il était horriblement jaloux d’elle. Il sut qu’elle rencontrait parfois Letourneur chez des amis communs, et, à la Bourse, il entendit le banquier parler d’elle dans les termes les plus chaleureux. Sans savoir exactement pourquoi, il était spécialement jaloux de Letourneur. Il se souvenait que, dès les premiers jours, son attitude vis-à-vis d’Emma l’exaspérait.

Généralement Letourneur se montrait avec les femmes assez impertinent, et, à l’occasion même, grossier. Il n’avait pas de maîtresses régulières, se contentant de caprices passagers pour des figurantes ou des écuyères qu’il payait très cher. Avec Emma, au contraire, il était d’une galanterie méticuleuse. Il lui faisait des compliments. Velard croyait qu’elle lui plaisait.

Certes, il n’y avait aucune raison pour qu’Emma