Page:Capus – Qui perd gagne.djvu/39

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Ces quelques paroles rompant le silence général suffirent à lui rendre son habituel aplomb. Il serra la main de Farjolle avec effusion.

— Tiens ! puisque vous êtes là, mon cher ami, vous allez me rendre un service…

Et il le prit ostensiblement par le bras et l’entraîna. Tout le monde en conclut qu’une affaire d’honneur s’engageait. Il ne restait plus qu’à patienter. Farjolle revint au bout de dix minutes et se rassit à côté de Brasier qui buvait lentement son café.

— Nous allons arranger ça, hein ? voulez-vous ?…

— Vous êtes son témoin ? Voici les miens, répondit Brasier.

Et il désigna d’un geste Radowski le remisier et Jean Dartot le journaliste, qui s’inclinèrent.

— Finissons notre café, nous causerons après déjeuner, en fumant un cigare, dit Farjolle.

Il pria le commandant Baret de l’assister. Le commandant, homme d’une cinquantaine d’années, rond et jovial, décoré de la Légion d’honneur, accepta sans même demander de détails. C’était le témoin naturel des membres du cercle : on l’appelait commandant à cause de cela et aussi parce qu’il connaissait à fond l’histoire de la guerre de 1870. Entre autres campagnes, il avait présidé le fameux duel au pistolet de l’an dernier, toujours entre deux membres du cercle, à la suite d’un scandale de jeu. Dans cette rencontre, le baron D. … accusé de tricher, logea une balle sous la sixième côte de son adversaire, laquelle balle fut extraite par le propre médecin du cercle, et la blessure elle-même fut pansée avec de la charpie appartenant à l’administration. Tout se passa donc en famille.