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Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/65

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C’était inadmissible. « L’ordre d’abord », songeait Lampieur. Il entendait par là que le plus faible doit céder à qui lui dicte sa volonté. Autrement, rien n’avait plus de sens. Comment aurait-il fait, par exemple, si Léontine s’était mise à lui résister ? Heureusement Léontine ne lui résistait pas : elle était commode à conduire. Elle s’effaçait. Elle se faisait, là-bas, toute petite, devant un verre auquel elle n’avait pas touché. Lampieur lui en sut gré. Au moins, avec cette fille, il n’aurait pas d’ennuis. Ce qu’elle pensait, ses soupçons, la maladive inquiétude qu’on pouvait lire dans ses regards, étaient sans importance. Ils finiraient, un jour, par s’altérer d’eux-mêmes et par se dissiper. Lampieur n’en doutait pas. D’ailleurs, à supposer que Léontine tentât d’aller plus loin dans le désir qu’elle avait d’en venir à de terribles précisions, Lampieur était bien décidé à ne pas lui en fournir les moyens. Pour elle comme pour lui, tout valait mieux plutôt que cette curiosité malsaine dont il se rendait compte que Léontine était la proie. S’il en jugeait d’après les effets qu’il en avait ressentis,