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IV

BREF RÉCIT DE MA VIE DEPUIS SON DÉBUT JUSQU’AU JOUR PRÉSENT

Peut-être, si Suétone y avait réfléchi, aurait-il ajouté un bref résumé à ses biographies pour la plus grande commodité de ses lecteurs ; car, comme disent les philosophes, rien ne peut être qui ne constitue en soi une unité.

Donc, je naquis à Pavie. Le premier mois, à ce que j’ai entendu dire, je perdis ma nourrice de la peste, le jour même où elle tomba malade. Ma mère revint : mon visage était marqué de cinq boutons disposés en croix, l’un étant au bout de mon nez. Aux mêmes endroits, trois ans plus tard, reparurent en même nombre des pustules de variole. Avant la fin du second mois, Isidoro Resta, (13) gentilhomme de Pavie, me plongea dans un bain de vinaigre chaud et me confia à une nourrice qui me porta à Moirago. (C’est un village situé à sept milles de Milan sur la route directe qui mène à Pavie par Binasco.) Là, mon ventre se gonfla et durcit, je maigris. La cause, on le comprit, était une grossesse de ma nourrice. On me confia à une autre, meilleure, qui me sevra à trois ans.

La quatrième année, je fus emmené à Milan, où je fus traité avec plus de douceur par ma mère et par sa sœur, ma tante Marguerite — une femme qui, je pense, n’avait pas de bile. — Cependant j’étais battu sans motif par mon père et par ma mère, et chaque fois j’en étais malade à mourir. Enfin arrivé à l’âge de sept ans, quand j’aurais pu à bon droit mériter des coups, mes parents — qui n’habitaient pas ensemble — décidèrent de ne plus me battre.

Mais la mauvaise fortune ne m’abandonna pas pour cela : mon malheur changea sans s’adoucir. Ayant loué une maison, mon père m’y logea auprès de lui avec ma mère et ma tante. De ce jour, il m’ordonna de l’accompagner, sans égard pour ma faiblesse et pour