Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 1.djvu/239

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Les riches terrains dont nous venons de parler, ceux où se trouvent la houille, la chaux et le minerai de fer, possédaient, il y a un siècle, autant qu’aujourd’hui, le pouvoir de contribuer au bien-être et aux jouissances de l’homme ; cependant ils ne constituaient point une richesse, parce que l’homme lui-même manquait de la science nécessaire pour le rendre capable de les forcer de travailler à son profit ; leur utilité était latente, elle attendait, pour se développer, l’action de l’intelligence humaine.

Chez l’individu de cette époque, nous constatons une série de faits exactement semblables : ses facultés étaient identiques à celles des individus de nos jours ; mais, elles étaient également latentes ; son cerveau était prêt à lui rendre des services s’il les eût réclamés ; mais il était incapable de le faire. Ce cerveau eût également travaillé à son profit sans qu’il lui en coûtât rien ; et non-seulement les choses se seraient passées ainsi ; mais en diminuant la somme des demandes faites aux forces musculaires de l’homme, il eût diminué, considérablement, la somme de nourriture nécessaire pour réparer les pertes résultant de l’emploi de son activité. L’emploi du temps indispensable pour subvenir à ses besoins eût été ainsi réduit dans sa durée, en même temps qu’il y aurait eu une augmentation correspondante dans la quantité des heures dont il pouvait disposer, pour étudier d’une façon plus approfondie les forces de la nature, et préparer les machines nécessaires pour soumettre ces mêmes forces et les faire servir à son profit.

La richesse consiste dans le pouvoir de commander les services toujours gratuits de la nature, que ceux-ci soient rendus par le cerveau de l’homme, ou par la matière au milieu de laquelle il vit et sur laquelle il doit agir. Plus est considérable la puissance d’association, c’est-à-dire plus grande est la diversité des demandes faites à l’intelligence humaine, plus est considérable également, ainsi que nous l’avons vu, le développement des facultés particulières — ou l’individualité — de chaque membre de la société ; et plus se développe la capacité pour l’association. Avec cette dernière arrive l’accroissement du pouvoir sur la nature et sur lui-même ; et plus est complète sa capacité pour se gouverner lui-même, plus doit être rapide le mouvement de la société, — plus est considérable la tendance vers de nouveaux progrès et plus est rapide aussi le développement de la richesse.