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CHAPITRE X.

DES CHANGEMENTS DE LIEU DE LA MATIÈRE.

§ 1. — Difficulté, dans la première période de la société, d’effectuer les changements de lieu de la matière. La nécessité de le faire constitue le principal obstacle au commerce. Cette nécessité diminue avec le développement de la population et de la richesse.

Le pauvre premier colon, incapable de soulever les poutres avec lesquelles il doit construire sa demeure, est forcé de compter, pour trouver un abri, sur les rochers en saillie, ou de s’ensevelir dans les cavités de la terre qui le protègent faiblement contre la chaleur de l’été ou la rigueur du froid en hiver. Hors d’état de commander les services de la nature, il est obligé de parcourir de vastes étendues de terrain pour chercher une nourriture dont le transport à son foyer domestique, lors même qu’il se la procure, dépasse souvent sa puissance privée de secours ; aussi les fruits de sa chasse se perdent-ils sur le sol, tandis que lui et sa femme souffrent par défaut d’une alimentation convenable. Avec le temps cependant, ses fils grandissent, et alors unissant leurs efforts, ils se font des instruments à l’aide desquels ils commandent les forces naturelles, au point de pouvoir couper et transporter les poutres et de se construire quelque chose qui ressemble à une maison. On les voit encore fabriquer d’autres instruments à l’aide desquels ils se procurent des quantités plus considérables d’aliments, et sur des surfaces moins étendues, avec une diminution constante dans la proportion de leur travail nécessaire pour opérer les changements de lien de la matière, et un accroissement constant dans la proportion de ce travail qui peut être consacrée à changer sa forme, dans le but de la rendre propre à lui fournir sa nourriture et à l’aider dans l’œuvre de production.

La vie de l’homme est une lutte contre la nature. Le premier