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§ 2. — Les opérations de banque n’existaient point en Angleterre à la date de la Restauration. Sous Charles II, les joailliers deviennent banquiers. Il en résulte augmentation dans l’utilité de la monnaie. Établissement de la banque d’Angleterre.

« Sous le règne de Guillaume, dit Macaulay, il y avait encore des vieillards qui se souvenaient du temps où ne l’on ne voyait pas dans la cité de Londres une seule maison de banque. Jusqu’à la Restauration, chaque commerçant avait son coffre-fort dans sa maison, et quand on lui présentait une acceptation, il comptait lui-même sur son comptoir les couronnes et les carolus. Mais l’accroissement de la richesse avait produit son effet naturel, la division du travail. Avant la fin du règne de Charles II, une nouvelle manière de payer et de recevoir l’argent s’était introduite parmi les marchands de la capitale. Il s’éleva une classe d’agents dont l’office fut de tenir la caisse des maisons de commerce. Cette nouvelle branche d’affaires tomba naturellement entre les mains des orfèvres qui étaient accoutumés à trafiquer sur une large échelle des métaux précieux, et qui avaient des caveaux où l’on pouvait déposer des masses de lingots considérables à l’abri du feu et des voleurs. C’était dans les boutiques des orfèvres de Lombard Street que se faisaient tous les payements en espèces. D’autres commerçants ne donnaient et ne recevaient que du papier. — Ce grand changement ne s’accomplit pas sans une forte opposition et sans de vives clameurs. Des marchands attachés à la vieille routine se plaignirent amèrement qu’une classe de gens qui, trente ans auparavant, s’étaient renfermés dans le cercle de leurs fonctions propres et qui avaient réalisé de beaux bénéfices en bosselant des coupes et des plats d’argent, en montant des bijoux pour de grandes dames, en vendant des pistoles et des dollars aux gentilshommes qui allaient en voyage sur le continent, que ces gens-là, disons-nous, fussent devenus les trésoriers et tendissent rapidement à devenir les maîtres de la cité tout entière. — Ces usuriers, disait-on, jouaient aux jeux de hasard ce que les autres avaient gagné par leur industrie et amassé par leur économie. Si les dés leur étaient favorables, le fripon qui tenait la caisse devenait alderman ; s’ils leur étaient contraires, la dupe qui avait fourni la caisse faisait banqueroute. — D’un autre côté, on exposait dans un langage animé les avantages d’un nouveau système. Ce système disait-on, économisait à la fois le travail et l’argent. Deux commis, dans une seule maison de banque, faisaient ce qui, sous l’ancien système, aurait occupé vingt commis dans vingt établissements différents. Le billet d’un orfèvre pouvait passer en une matinée dans dix mains