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que le montant de sa circulation, qui s’était élevée à 29.000.000. Par l’opération très-simple de faire rentrer son actif, d’une part, et de réduire ses obligations, de l’autre, elle réduisit la quantité apparente de monnaie à la disposition de la communauté, à 12.000.000. En ce qui regardait les opérations de la société, c’était l’équivalent d’une annihilation totale de cette somme considérable, et une contraction correspondante de l’étalon auquel la communauté doit rapporter la valeur de toutes les autres utilités et choses. Doubler la longueur de l’aune ou le poids de la livre, au bénéfice de tous les individus qui ont contracté pour acheter du drap ou du blé, eut été un préjudice insignifiant comparé à la révolution ainsi accomplie. Comparée avec la propriété de la population de la Grande-Bretagne, la somme était tout à fait insignifiante, pourtant sa disparition causa un arrêt de circulation presque aussi complet que celui que produirait dans un corps physique l’arrêt d’alimentation, fermiers et marchands furent partout ruinés. Des banques de provinces, il n’y en eut pas moins de deux cent quarante, — c’est-à-dire une sur quatre, — qui suspendirent leurs payements, tandis qu’une sur dix et demi firent faillite. — Des milliers de milliers d’individus, dit Mac-Culloch, qui, en 1812, se considéraient comme riches, se trouvèrent dénués de toute propriété réelle, et tombèrent comme par enchantement et sans qu’il y eût faute quelconque de leur part, dans l’abîme de la pauvreté. Il y eut par le pays, pour se servir de l’expression de M. Francis Horner, une universalité de dénuement et de misère dont on n’avait point eu d’exemple, si ce n’est peut-être la débâcle en France du projet du Mississippi[1]. Au milieu de toute cette ruine, cependant, la Banque prospéra plus que jamais, car la destruction du crédit privé rendait ses caves et ses billets plus nécessaire à la communauté.

Le terrain étant ainsi préparé par la banque, le Parlement passa, en 1819, un acte qui pourvut à la reprise des payements en espèces, et par là rétablit, comme loi du pays, l’étalon qui existait en 1797, — une des mesures des confiscation le plus remarquables qui se puissent trouver dans les annales de législation. Pour plus de vingt ans, toutes les transactions du Royaume-Uni avaient été basées sur une circulation moindre en valeur que celle qui avait existé en

  1. Cité par Mac-Culloch, note 9 de son édition de la Richesse des nations.