Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 3.djvu/151

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L’expérience de l’Europe pour des milliers d’années, et celle de l’Amérique pour les trois derniers siècles nous conduisent à des conclusions tout à fait contraires ; cependant M. Ricardo affirme avec insistance que telle est la loi. D’après cela, comment songer à se mettre au travail ? Nous ne connaissons aucune autre loi de la nature suspendue ainsi in terrorem une loi de terreur, au-dessus de l’homme ; aucune dont l’action soit ainsi interrompue pour l’aider, à quelque époque de l’avenir, avec une énergie accrue à l’infini pendant l’interruption. La population s’accroissant chaque jour et très-vite, la nécessité de recourir aux sols moins productifs doit s’accroître à chaque heure ; et cependant il est permis à l’homme d’aller multipliant son espèce, dans une ignorance avenue et bénite de ce fait : que ses descendants sont destinés à endurer tous les tourments de la faim, tandis que les propriétaires fonciers seront dans une abondance telle qu’on en a jamais connue, — une classe devenant maîtresse et les autres esclaves.

Posons maintenant que la culture commence toujours par les sols pauvres, — passant de là aux sols humides et aux anciens lits des fleuves, — nous aurons l’inverse de la proposition. La quantité de la rente s’accroîtra à chaque amélioration et diminuera à chaque obstacle à l’amélioration ; — les intérêts tant du propriétaire que du laboureur sont ainsi en parfaite harmonie. Une culture améliorée fait nécessairement l’accroissement de richesse. Plus il y a de bêches et de charrues et plus leur qualité est supérieure, plus l’effort humain obtient de rémunération, et plus augmente la quantité de la rente. Plus il y a de machines à vapeur, plus l’opération du drainage devient facile, mieux le travail est rémunéré et plus augmente la quantité de la rente. Plus il y a de moulins, plus est facile la conversion du grain en farine, et mieux le travail est rémunéré, plus augmente la quantité de la rente. Plus il y a de fabriques, moins on a de peine à se procurer du drap, plus augmente la proportion que l’on peut consacrer à améliorer la terre par le drainage, les chemins, les ponts, les écoles, mieux le travailleur est rémunéré plus s’accroît la quantité de la rente. Les intérêts du propriétaire sont donc directement favorisés par toute mesure qui tend à accroître la richesse de la communauté et à améliorer la culture.

Quant au travailleur, comme il voit qu’à chaque progrès en nombre et en qualité des bêches, charrues, machines, chemins, mou-