Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 3.djvu/260

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Mais bien que la loi du plus fort décide, il n’est pas de l’intérêt, et en général il n’est pas dans les habitudes du plus fort d’user à outrance de cette loi, en poussant ses excès aux dernières limites ; et tout relâchement en ce sens à devenir une coutume, et toute coutume à devenir un droit. Ce sont des droits ayant cette origine et non 1a concurrence sous aucune forme, qui détermine dans une société grossière, la part de produits dont jouissent le producteur. Les rapports établis plus particulièrement entre les propriétaires et le cultivateur, et les payements faits par le premier au second, ne sont dans toutes les sociétés, excepté les plus modernes, déterminées que par l’usage du pays. Ce n’est qu’à des époques récentes que les conditions de possession de la terre (comme règle générale), sont devenues une affaire de concurrence. Le possesseur, pour un temps déterminé, a presque toujours été considéré comme ayant le droit de conserver la possession en remplissant les conditions exigées par la coutume ; et il est devenu ainsi, en un certain sens, co-propriétaire du sol. Dans les pays mêmes où le possesseur n’a pas acquis cette fixité de tenure, les conditions de l’occupation ont souvent été fixes et invariables. »

La coutume est « un puissant protecteur. » On marche à la liberté, ou l’on marche à l’esclavage, selon la manière dont on décide la question : si l’on donnera à la coutume force de loi, ou si l’on ne tiendra d’elle aucun compte, — laissant le faible tout à la merci du fort. Dans l’Attique primitive, — à l’époque du commerce en progrès, — il devint de plus jeu plus de coutume, — jusqu’à ce qu’à la longue, sous les Institutions de Solon, cela devint la loi : — que des milliers de gens, qui jusqu’alors avaient été privés des avantages de la concurrence pour l’achat de leur travail, fussent autorisés à en disposer aussi librement que ceux qui avaient été leurs maîtres. Cependant, la guerre et le trafic étant devenus plus tard la politique établie à Athènes, la concurrence pour l’achat du travail s’éteignit par degrés jusqu’à ce qu’enfin il devint de règle établie qu’il n’existerait plus pour le travailleur qu’un acheteur unique, — et que celui-ci serait autorisé à déterminer lui-même le mode de distribution.

En France, le travailleur garda ses droits coutumiers et en acquit de plus en plus jusqu’à ce qu’à la longue la terre se divisât parmi une masse de libres propriétaires, — qui tiennent leurs