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convitcs[1]. On a employé des commissaires d’émigration pour exporter les femmes qui devaient servir de compagnes aux hommes que les navires avaient transportés. On a chassé des Écossais de leurs petites tenures et on les a envoyés au Canada où ils sont arrivés en plein cœur de l’hiver, sans ressource aucune pour se procurer la nourriture et le vêtement. En Irlande on a mis à bas cottages et hangars, pour forcer à l’exportation les malheureuses familles qui les occupaient[2]. Voilà comment 2.144.802 individus ont quitté le Royaume-Uni dans la courte période de sept ans, qui a fini en 1854. Sur ce nombre, il est probable que 100.000 ont péri dans le trajet vers leur nouvelle demeure, victimes du système qui trouve dans l’achat sur le marché le plus bas et la vente sur le marché le plus cher, le stimulant suprême à l’action, et qui voit dans l’homme un pur instrument à l’usage du trafic[3].

§ 6. — Tendance à l’excès de population et à une nécessité d’émigration en raison directe de l’écart entre les prix des denrées premières et des nécessités achevées. La politique anglaise tend à augmenter cet écart. Les pays qui se guident sur l’Angleterre sont ceux qui fournissent les faits dont on s’est servi pour démontrer la théorie Malthusienne.

L’homme chercher à acquérir l’empire sur la nature. Pour y parvenir, il doit apprendre à utiliser les diverses facultés qui le distinguent des animaux inférieurs. Plus elles sont utilisées, plus se perfectionne son pouvoir de combinaison avec ses semblables, plus se développent les diverses utilités de la terre, plus s’accélère la circulation sociétaire, plus s’accroît la faculté d’accumulation, plus l’équité règle la distribution, plus il y a pour les services con-

  1. La constitution sociale de la colonie est dans la condition la plus déplorable. Des crimes du caractère et de la perversité les plus horribles se commettent de tous côtés. Les routes sont couvertes de bush rangers, écumeurs de buissons ; les rues fourmillent de voleurs et de gens capables de tout. En plein jour, des hommes ont été jetés à terre, roués de coups et volés ; les boutiques ont été envahies par des bandits armés, qui ont jeté dehors les habitants et pillé les lieux, et cela dans des quartiers populeux. La nuit venue, personne n’ose se hasarder dans les rues. Les voleurs couvrent le terrain en un tel nombre, et sont si acharnés à leur œuvre, que nous tenons pour certain qu’ils doivent souvent se voler entre eux. Les meurtres effroyables sont devenus si nombreux que c’est à peine s’ils excitent l’attention pour tout un jour. Notre système de police est si peu efficace que c’est à peine si, depuis la fondation de la colonie, on a livré à la justice un seul coupable d’assassinat prémédité. Melbourne Argus.
  2. La population entière d’un district de plusieurs milles d’étendue fut simplement jetée sur la grande route « pour y vivre ou mourir comme ils purent. » Cette courte sentence, empruntée au London-Times, résume toute l’histoire de l’Irlande pendant une grande partie des dix dernières années.
  3. La mortalité, dans la traversée de l’Atlantique, est effrayante ; — parfois, elle égale presque celle des bâtiments négriers venant d’Afrique. Des bâtiments jugés hors d’état de recevoir des marchandises qu’on puisse assurer, sont employés à transporter des hommes, des femmes, des enfants qui ne peuvent l’être.