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Page:Carmontelle - Les Femmes, tome II.djvu/132

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LES FEMMES

le verrez, vous pourrez vous rassurer mutuellement et jouir enfin du bonheur que le ciel vous destine. En effet, ils se virent, et bientôt ils s’épousèrent. Ils ne furent pas absolument heureux ; c’est-à-dire, monsieur de Sainte-Aure, qui crut que sa femme ne pouvait pas l’aimer autant qu’avant ses blessures ; il voulait lui cacher les craintes qu’il en avait ; mais les manières douces, honnêtes, et même prévenantes de sa femme envers tout le monde, firent germer dans son cœur une jalousie affreuse. Elle la supporta avec une patience dont elle seule était capable ; elle ne voyait même dans les reproches qu’il lui faisait que la preuve du plus violent amour, et elle se trouvait la femme du monde la plus heureuse. Cette tranquillité, au lieu de calmer l’humeur et la jalousie de monsieur de Sainte-Aure, ne fit qu’aigrir son caractère ; il oublia tout ce qu’il devait à sa femme, jusqu’au sacrifice