Page:Caro - George Sand, 1887.djvu/177

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de voir d’un trait simple et sobre ; elle n’insistait pas. Même dans ses lettres, elle n’aimait guère la discussion, elle ne la prolongeait pas volontiers, au moins dans l’ordre de ses idées sociales et politiques. Bien qu’elle y mît toute son ardeur, elle ne recherchait pas pour elles l’occasion de la controverse ; elle craignait de les compromettre. « Je n’ai pas de facultés pour la discussion, disait-elle, et je fuis toutes les disputes, parce que j’y suis toujours battue, eusse-je dix mille fois raison. » Et quand par hasard elle s’est aventurée sur le terrain brûlant où ses rêves humanitaires essayent de prendre pied, elle interrompt, dès qu’elle peut, la discussion : « Il paraît que je ne suis pas claire dans mes sermons ; j’ai cela de commun avec les orthodoxes, mais je n’en suis pas ; ni dans la notion de l’égalité, ni dans celle de l’autorité, je n’ai pas de plan fixe. Tu as l’air de croire que je te veux convertir à une doctrine, mais non, je n’y songe pas. Chacun part d’un point de vue dont je respecte le libre choix. En peu de mots, je pense résumer le mien : Ne pas se placer derrière la vitre opaque par laquelle on ne voit rien que le reflet de son propre nez. »

Cette insignifiance d’aspect n’était que pour le premier regard. Si le hasard ou une bonne inspiration amenait l’entretien sur certains sujets qui lui étaient familiers, sa parole froide et paresseuse s’animait un peu ; ses grands yeux alanguis reprenaient du mouvement et de l’éclat. Sur deux sujets surtout, elle aimait à causer : la vie de famille et le théâtre.