la volonté tendue. Enfin Rousseau était arrivé ; elle avait reconnu son maître, elle avait subi le charme impérieux de cette logique ardente, et son divorce avec le catholicisme fut consommé.
Dans ce conflit d’opinions et de doctrines, sa force nerveuse s’était épuisée à essayer de tout comprendre, de tout concilier ou de choisir. René de Chateaubriand, Hamlet de Shakespeare, Byron enfin avaient achevé l’œuvre. Elle était tombée dans un désarroi intellectuel et moral, dans une mélancolie qu’elle n’essayait même plus de combattre. Elle avait résolu de s’abstenir autant que possible de la vie ; elle avait même passé du dégoût de la vie au désir de la mort. Elle ne s’approchait jamais de la rivière sans éprouver dans sa tête comme une gaieté fébrile, en se disant : « Comme c’est aisé ! Je n’aurais qu’un pas à faire. » Oui ou Non ?--Voilà ce qu’elle se répétait assez souvent et assez longtemps pour risquer d’être lancée par le Oui au fond de cette eau transparente qui la magnétisait. Un jour, le Oui fut prononcé ; elle poussa son cheval hors de la voie marquée par le gué, dans le hasard des eaux profondes. C’en était fait d’elle et des chefs-d’œuvre futurs, si la bonne jument Colette ne l’avait sauvée, d’un bond extraordinaire, hors du gouffre.
La mort de sa grand’mère, dont elle raconte les derniers moments avec une douleur sans phrase et une sincérité touchante, termina la période d’initiation. La séparation entre les deux familles paternelle