le plus insupportable des hommes en lui enlevant sa femme. Tout le monde est plus ou moins communiste ici, dans le singulier monde où s’agitent les personnages du roman : M. Antoine, gentilhomme déchu ; Jean, le paysan philosophe ; Janille, la servante ; Émile, Cardonnet, le jeune sage ; M. de Boisguilbault, le vieux fou. Il n’y a que M. Cardonnet le père qui ne trempe pas dans l’idée nouvelle ; mais aussi on a bien soin, comme si cela ne s’entendait pas de soi-même, d’en faire le type de l’industriel sans cœur, dont la froide brutalité fait mourir sa femme, et qui broie les idées comme les hommes sous la meule de son usine. Tout ce monde-là (toujours M. Cardonnet excepté) a les deux caractères obligés des personnages : l’héroïsme du cœur et l’argumentation intarissable. C’est à qui fera les plus belles actions et parlera le plus longtemps. La palme reste à M. de Boisguilbault.
III
Déjà pourtant, à la même époque où le rêve humanitaire obsédait si
cruellement cette belle imagination, il s’était fait en elle plus d’une
révolte sourde contre la tyrannie des amitiés et des idées
systématiques. Plus d’une fois elle avait osé, pour respirer le grand
air des libres espaces, soulever un instant le joug de plomb qui
l’écrase. Entre le Meunier d’Angibault et le Péché de M. Antoine,
ces deux grosses