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sans doute, pour désigner l’embouchure, qui forme une nappe d’eau exposée à tous les vents.

Jacques Cartier, qui a nommé le Saint-Laurent, donna aussi un nom au Saint-Maurice ; il l’appela rivière de Fouez. Nous écririons aujourd’hui rivière de Foix, s’il faut admettre l’interprétation de Lescarbot et de plusieurs autres ; et ce nom fut sans doute donné en l’honneur de quelque membre de la famille de Foix, famille noble qui jouait alors un certain rôle en France.

On le conserva pendant un certain temps, mais il tomba peu à peu en désuétude.

Les traitants, depuis Pontgravé, se mirent à appeler le Saint Maurice les Trois-Rivières ou la riviére des Trois-Rivières. Ce nom s’étendit aussi à la ville ou au fort que l’on commençait à élever à son embouchure.

Les auteurs du temps ne nous laissent pas ignorer la raison de cette appellation, qui paraît étrange à certaines personnes : « Nous passâmes aux Trois-Rivières, » dit le frère Sagard, « que je contemplai curieusement pour être un séjour fort agréable et charmant. Les Français ont nommé ce lieu les Trois-Rivières, pour ce qu’il sort des terres une assez belle rivière qui se vient décharger dans le fleuve Saint-Laurent par trois principales embouchures, causées par plusieurs petites îles qui se rencontrent à l’entrée de cette rivière. » (Hist. du Canada et voyages que les Frères Mineurs Récolets y ont faits pour la conversion des infidèles.)

Les Relations des Jésuites s’expriment avec la même exactitude.

La ville des Trois-Rivières, voilà un nom qui était fait pour demeurer, et qui sut résister au temps et aux bouleversements de toute sorte ; mais rivière des Trois-Rivières était un de ces noms inacceptables que nos pères ne pouvaient souffrir bien longtemps, car ils avaient l’oreille délicate. Dans un jugement rendu par l’intendant Bégon en 1723, il est dit que le fief Saint-Maurice est situé sur la rive ouest de la rivière vulgairement nommée fleuve de Saint-Maurice. Le peuple avait donc commencé son œuvre, il substituait un beau