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sain et sauf dans le grand remous dont nous avons déjà parlé.

Mais voici une autre anecdote que nous recommandons à l’attention et à la piété de nos lecteurs. Quelques personnes étaient parties de Saint-Maurice pour aller faire visite à des colons nouvellement établis à Sainte-Flore. Il n’y avait pas encore de curé dans cette paroisse, ni, à plus forte raison, dans la paroisse des Piles. Le dimanche arrivé, nos promeneurs voulurent se donner une petite récréation : Nous allons traverser aux Piles, se dirent-ils entre eux, pour manger des framboises. Ils montèrent dans un canot, et un homme s’emparant du seul aviron qu’il y eût, fit partir la nacelle. On était au milieu de la traversée, lorsqu’un accident vint jeter la consternation dans ce groupe si joyeux : l’aviron se cassa, et il ne resta dans les mains du canotier qu’un petit bout de manche tout à fait inutile. Un cri de terreur s’échappa de toutes les poitrines, et comme on s’aperçut que le canot se dirigeait déjà vers la chute, tous les passagers se précipitèrent à l’eau. Mais le fleuve fut sans pitié : nacelle et passagers furent engloutis dans le gouffre.

Il y eut cependant une exception : Vitaline Duchesny épouse de John Thomelson se voyant au moment de périr, prit son scapulaire et s’adressant à la mère de Dieu : « Sainte Vierge, » lui dit-elle, « je sais que vous avez fait beaucoup de miracles par votre scapulaire, eh bien ! vous allez en faire un pour moi aujourd’hui ; je vous en prie donc, sauvez-moi de l’eau en ce moment. » Au lieu de suivre le fil de l’eau, elle fut alors poussée par une main invisible, et se rendit tranquillement au rivage.

Cette femme est encore vivante, elle rend gloire à la Sainte Vierge, et elle ne manque pas de recommander la dévotion au scapulaire de Notre-Dame du Mont-Carmel.

J’aurais peut-être pu trouver d’autres anecdotes dans la mémoire tenace des vieillards du Saint-Maurice, mais je préfère laisser mes lecteurs sous la bienfaisante impression de celle que je viens de leur raconter.