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temps n’était pas encore venu pour les colons canadiens de se mettre à la tête d’une entreprise qui demandait des avances d’argent si considérables. On fit fonctionner les forges Saint-Maurice, mais au nom et au profit du roi de France.

Les fourneaux furent réparés, des maisons furent bâties, entr’autres, croyons-nous, cette Grande Maison qui est aujourd’hui une admirable relique, et les travaux commencèrent sur une grande échelle. Les Forges purent alors fournir à toute la population du Canada des poèles, chaudrons, marmites, fers à repasser, haches, pelles de fer, et autres articles d’un usage quotidien. Les poèles surtout attiraient l’attention générale, et l’on pouvait à peine suffire aux demandes qui en étaient faites.

Le poèle, en effet, est un meuble indispensable dans une maison canadienne. Nos hivers de six mois ont leurs charmes et leurs avantages, oui, mais à condition qu’il y ait un poèle bien ronflant au milieu de la famille. Quand on pense que les premiers colons se chauffaient au feu de cheminée, on se demande comment ils ont pu résister aux rigueurs de notre climat.

« On fit venir de la Bourgogne et de la Franche-Comté plusieurs chefs ouvriers, lesquels tenaient leurs traditions des hommes que Colbert avait envoyés en Suède, soixante-quinze ans auparavant, apprendre le métier de mouleur et fondeur. C’est si bien le cas que le naturaliste suédois Peter Kalm, visitant nos forges en 1749, y trouva toutes les choses réglées comme dans son pays. »[1] Il dit dans son récit de voyage que le bois y est proche, le minérai fusible et de bonne qualité ; il dit aussi que plusieurs des employés se sont bâti de jolies maisons, mais il assure que les Forges ne rapportent aucun profit au roi.

M. Franquet, qui visita le Canada comme inspecteur des fortifications en 1748, visita aussi les Forges St-Maurice. Pour nous distraire un peu nous allons l’accompagner dans sa petite excursion. Il commence par donner quelques détails sur les Trois-Rivières :

  1. Histoire des Ursulines des Trois-Rivières, page 381.