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ment de faiblesse ou d’irrésolution. Quand l’obstacle est franchi, ils s’élancent sur le chaland avec leurs habits trempés. Or, à mesure que la nuit s’avance, il s’élève un vent glacé des plus désagréables ; nous qui sommes bien vêtus et toujours sur un plancher sec, nous sommes grelottants. Nous trouvons donc la conduite de ces hommes admirable, en considérant surtout que plusieurs ont déjà reçu la visite chez eux, et ne se trouvent ici que par complaisance et par esprit de foi.

Non seulement la navigation est difficile, mais encore il faut faire des sinuosités qui rappellent bien celles de la rivière Croche. À un endroit surtout, on arrive sur un rocher qui s’élève en dos d’âne, on fait un détour considérable, puis on revient à un demi-arpent du point d’où l’on est parti.

Il y a peu de chant pendant ce voyage : le travail immense que s’imposent nos hommes nous ôte l’envie de chanter.

Nous avions au-dessus de nos têtes un beau ciel étoilé, et Monseigneur s’occupa longtemps à montrer à notre aimable servant de messe les constellations les plus intéressantes.

Nous arrivons au rapide Blanc, ainsi nommé à cause de la mousse blanche que forment les eaux en s’y brisant sur les pierres. Ici, nous devrons faire un trajet en voiture ou à pied.

La lumière d’un fanal brille sur la rive : nous abordons, et nous reconnaissons, au milieu de plusieurs autres, M. Adolphe Landry, le jeune ecclésiastique que nous avons déjà rencontré à Saint-Roch de la Mékinac. Une grande voiture, entourée de feuillages, nous attend. Monseigneur, M. Prince, M. Gravel et moi y prenons place ; les autres font le trajet à pied.

En haut du rapide, une barge reçoit Monseigneur et M. Prince, un canot d’écorce porte M. Gravel et votre humble serviteur, et nous voguons sur la rivière mais toujours péniblement.

À mi-chemin, M. Prince qui redoute les mouvements de la petite barge où il est, descend à terre et,