Page:Caron - Journal de l’expédition du chevalier de Troyes à la baie d’Hudson, en 1686.djvu/61

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 51 —
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

avoient imite ceux de l’autre bout s’estant mis a l’eau dans leurs canots avec tout ce qui ne se pouvoit gaster, jusques au sac de bled d’inde dont tout le détachement vivoit. Nous rencontrâmes une bende (427 bis) de sauvage, en entrant dans la prairie, qui nous aiderent beaucoup a sauver nos hardes et autres choses de l’embarquement. Nous estions dans cette prairie, qui n’avoit au plus que vingt pas de large, enfoncey jusques aux genoux, tant nous avions de précipitation de nous embarquer, ce que nous fîmes dans deux canots qui vinrent nous prendre sur le bord du lac qui n’a pas en cet endroit plus de trente pas de large, le feu y devint si furieux que les flames y pasoient comme un torrant par dessus nos testes, et allumèrent le bois de l’autre bord. C’estoit une chose bien triste de nous voir exposey entre deux si impitoiables elemens, dans des canots qui n’estoient faits que d’ecorce et baraques de bois de cèdres sont extrement combustibles. Il falloit pourtant si tirer d’un si méchant pas, de sorte que, aiant remarque, nous serions plus seures vis a vis l’endroit ou le feu avoit passé, j’y fis aller les cannots qui n’y trouvèrent nul danger, et deux heures après ceux qui estoient restés au bout d’en bas continuèrent leur portage, comme si rien n’avoit arrivé, n’y aiant plus que quelques arbres secs qui bruloient, et les autres estoient tous noirs et depouilley de leurs feuilles[1] ceux qui pourront avoir la curiosité

  1. L’endroit où se passa cet incident est situé tout près de la frontière interprovinciale, dans le canton Dupuy, entre le lac Durand (ancien Kiskabeka) et le lac Foudras (ancien Nabugushk). Il y a encore une petite prairie de foin sauvage à l’extrémité est de ce dernier lac. Tout ce terrain est marécageux.