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MÉTAMORPHOSES D’UNE GOUTTE D’EAU.

était captive chez ces pauvres êtres qui semblaient au dernier degré de l’espèce humaine, le saint amour de la famille les animait et suffisait à les rendre heureux. Nécessaires les uns aux autres, les services mutuels entretenaient leurs sentiments affectueux ; car, dans ces contrées, moins qu’ailleurs encore, l’homme ne saurait vivre seul. Les Esquimaux ont même un grand attachement pour les chiens qu’ils attellent à leurs traîneaux de chasse. Les mères soignent leurs jeunes enfants avec une vigilance extrême, employant pour les préserver du froid les moyens les plus ingénieux. Sans cette sollicitude de tous les instants, les pauvres petites créatures ne pourraient résister aux hivers longs et cruels de ces âpres climats. Continuellement blotties auprès de leur mère sur la banquette couverte de doubles fourrures qui garnit le pourtour intérieur de leur habitation, elles ne souffrent aucunement du froid ; et, si quelque occupation éloigne cette femme pour un instant, un membre quelconque de la famille la remplace aussitôt pour empêcher la déperdition de la chaleur qui serait fatale à l’enfant.

Dans la saison du grand jour, quand le blanc linceul qui couvre cette terre désolée se replie, et que l’herbe commence à poindre, la famille abandonna la hutte après avoir emporté tout ce qui la garnissait, et elle émigra vers une contrée plus riche