Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
12

jour, et ne reſpectant que l’honneur, dont j’avois toujours le nom ſur les levres plus par hauteur que par ſoumiſſion, prêt pour garantir le mien de toute tache à violer toutes les lois qui auroient pu m’empécher une ſatisfaction, un dédommagement, une vengeance de tout ce qui avoit l’apparence d’injure, ou de violence. Je ne manquois à perſonne, je ne troublois pas la paix des ſociétés, je ne me mêlois ni d’affaires d’état, ni des différens des particuliers, et voilà tout ce que j’avois de bon, et ce que je croyois ſuffiſant pour être à l’abri de tout malheur, qui en me ſurprenant auroit pu me priver d’une liberté, que je ſuppoſois inviolable. Lorsque dans certains momens je jettois un coup d’œil ſur ma conduite je ne manquois pas de la trouver exempte de reproche, puisqu’en fin mon libertinage ne pouvoit que tout au plus me rendre coupable vis à vis de moi-même, et aucun remords ne troubloit ma conſcience. Je croyois de n’avoir autre devoir que celui d’être honête homme, et je m’en piquois, et n’ayant beſoin pour vivre ni d’emploi, ni d’office, qui auroit pu géner pour quelques heures ma liberté, ou m’obliger à en impoſer au public avec une conduite